Houle Musique

Enregistré dans la salle des machines d’un chalutier, « 60°43’ Nord » nous invite à une rave party au milieu de l’océan atlantique. Loin de toute rock’n’roll attitude, Molécule nous emmène rêver sous les latitudes électro. Le voyage est inoubliable.

 Dans « Moby Dick », Herman Melville nous embarque dans le sillon d’un homme obsédé par une baleine qu’il n’attrapera jamais, et finalement en quête du sens de la vie. Il y a aussi un côté épique dans « 60°43’ Nord », le projet de Romain Delahaye-Sérafini, alias Molécule. Son odyssée pourrait même s’appeler Moby Disc, tant son capitaine a souhaité larguer les amarres pour mieux se retrouver…

Trente-quatre jours sans escales, 4896 miles parcourus, des déferlantes de 17 mètres de haut, 200 kilos de matériel pour créer son boat studio… Le matelot n’a pas hésité à se jeter à l’eau et à s’isoler au milieu de l’Atlantique, pour pêcher l’inspiration. Aucun disque à bord, mais uniquement le son des machines et l’air mélodique du grand large pour composer : bruit sourd des vagues contre la coque, sifflement du vent sur l’acier du bateau, claquement des câbles, grondement du moteur… Électro, la symphonie est aussi aquatique, et la pêche aux sons, miraculeuse. Quand certains cargos de nuit passent trente-cinq jours sans voir la mer, Romain Delahaye l’a regardée dans le bleu des yeux pendant trente-quatre jours. Et plutôt qu’un sous-marin jaune psychédélique, c’est un bateau naviguant tempère peinard, à contre courant du mainstream qui point à l’horizon.

Pour brosser le tableau de « 60°43’Nord », imaginez Matthew Herbert et François de Roubaix sur un bateau, sans qu’aucun ne tombe à l’eau. Édifiant, le résultat ressemble à une croisière technoïde, entre électro ambiant immersive et rave berlinoise. Présentée en live lors des dernières TransMusicales, la tempête sonore, même si imaginaire, s’est avérée très efficace. Mélodique et sensible, ce livre-album n’est pas que beau, il est aussi très bon.

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JBG